Méditation du père Michel Naas pour la fête de l'Immaculée Conception — Doyenné 02 / Banlieue - Val de l'Ognon

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Méditation du père Michel Naas pour la fête de l'Immaculée Conception

L’Immaculée Conception

Petite Méditation librement inspirée du livre de Martin Steffens
« MARIE, comme Dieu la conçoit »

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En lisant le livre de Martin Steffens, m’est venue l’idée d’une petite méditation sur Marie et son Immaculée Conception, cette grande fête qui se vit durant le temps de l’Avent, et à laquelle, ce livre peut donner un éclairage nouveau.

Tout commence au 19ème siècle…

Quand la petite Bernadette Soubirous va dire au curé Peyramal de Lourdes qu’elle a rencontré une dame en blanc, qui lui a dit qu’elle était l’Immaculée Conception - et ceci en patois « Que soy era l’immaculada conceptiou » - elle ne comprenait pas vraiment ce qu’elle disait, et l’abbé Peyramal ne l’a sans doute pas mieux compris. Il faut dire que le dogme de l’Immaculée Conception n’avait été promulgué que le 8 décembre 1854, par le pape Pie IX, soit 4 ans plutôt. Ce dogme semble faire une irruption subite dans la vie de l’Église, alors qu’on le sait, il mûrissait lentement dans l’âme des croyants depuis des siècles.

Donc, « Que soy era l’immaculada conceptiou », c’est ce que dit la Belle Dame à la petite fille inculte ! « Je suis », comme l’avait dit Yahvé hier du fond de ce buisson ardent à Moïse : « Je suis qui je serai », ce qui veut simplement dire comme le dit Jésus en saint Jean aux deux premiers disciples : « Suis-moi » et tu verras qui je suis, vis avec moi et tu comprendras. La phrase de la Belle Dame, même si c’est ce que Bernadette retient, « l’Immaculée Conception » c’est d’abord difficile à dire, ensuite difficile à comprendre, et le curé de Lourdes, est sans aucun doute très étonné de la finesse dont fait preuve Bernadette et ça le déstabilise, car lui-même ne voit pas trop ce dont il est question ; mais il va la prendre au sérieux puisqu’elle lui parle d’un dogme dont il ne comprend pas le mystère.

Tout commence par la visite de l’Ange Gabriel à une jeune fille de la maison de David appelée Marie nous dit saint Luc.

Et saint Luc met dans la bouche de Marie un étonnement enfantin : « Comment cela va-t-il se faire puisque je ne connais pas d’homme ? », étonnement tout différent de celui de Sarah, la femme d’Abraham, qui ricane à l’annonce de la future naissance d’Isaac, ou de celui de Zacharie qui doute à cause de la vieillesse de son couple.

Mais est-ce vraiment là que tout commence ?

Comme on le voit dans l’Ancien Testament, ou comme nous le dit saint Paul, tout dans la création converge vers la naissance de l’enfant dont elle est le but premier ; de ce fait, tout converge vers celle qui portera cet enfant, la nouvelle Ève dont parlent les litanies de la Sainte Vierge et dont parle aussi saint Paul.

Comme l’Amour généreux de Dieu a créé le monde à partir de rien et pour rien, de même, nous est donnée une mère qui, en disant « Me voici », donne la vie au sauveur d’un monde nouveau.

De même que le but ultime de la création est le don de la terre aux hommes, de même l’Immaculée Conception est le don d’une vie, celle du Christ de qui émane le don de toute Vie.

En fait tout commence avec la création !

La création est un cadeau pour nous les hommes, les derniers créés, selon le premier récit de la genèse, et nous sommes à la fois le cadeau, et ceux à qui le cadeau est destiné.

On peut penser que la première personne à qui est faite l’offrande de la création c’est Dieu lui-même. Le monde irait-il de Dieu à Dieu ? Et si c’était le cadeau que le Père fait au Fils en vue de son Incarnation ! Mais c’est aussi le cadeau que Dieu fait à l’homme - en genèse c’est l’homme qui nomme toutes les créatures de la terre - en vue de sa Rédemption.

L’incarnation c’est donc en vue de la rédemption que le monde fut fait. Dieu en créant le monde l’offre à son Fils, afin qu’il devienne Christ, Messie, Envoyé du Père. Une Incarnation qui répond au péché advenu par Adam : si le péché est advenu par un homme, de même le salut advient par un Homme, le Christ.

Comme le rappelle la Parabole des talents, le péché c’est le refus du don, c’est le refus de prendre des risques, c’est le refus de l’acceptation du don gratuit de la grâce. L’exultet que nous chantons au soir du samedi saint, ne dit rien d’autre : « bienheureuse faute d’Adam qui valu à l’homme pécheur un tel rédempteur », et cela lie ainsi étroitement Incarnation et Rédemption.

Mais la création est marquée par le péché dit d’origine

Notre péché originel est le refus du « Me voici », c’est-à-dire d’accepter d’être don de Dieu. C’est tout le contraire de Marie qui dit sans trop comprendre « Me voici », et devient mère du Christ. Cela nous fait mieux comprendre le Mystère de l’Immaculée Conception.

Comme l’étonnement de Marie est enfantin, de même son regard l’est aussi, chaque jour quand elle regarde notre péché, elle qui ne l’a pas connu. Elle ne peut entrer dans la dynamique du péché des hommes puisqu’elle n’a pas retenu pour elle ce qui lui a été donné, puisqu’elle donne au monde son Fils.

Il est toujours difficile de parler de péché. Le péché est la condition sine qua non, et c’est dramatique, de la liberté de l’Homme : Dieu crée l’homme, le met au jardin d’Eden et il se retire laissant Adam et Ève l’un à l’autre. La joie de Dieu est de vivre et de laisser vivre. Mais il ne se désintéresse pas pour autant de ce qui arrive aux humains. Quand il reparaît au jardin, il pose la question à Adam : « Où es-tu ? » De même à Caïn il demande : « Qu’as-tu fais de ton frère ? » Et l’un et l’autre au lieu de dire comme Marie : « Me voici ! » et parler de ce qui leur arrive vont éluder la question, l’un en disant qu’il se cachait parce qu’il était nu, l’autre parce qu’il n’a pas la garde de son frère. Leur vie est désormais uniquement tournée vers eux-mêmes !

Marie dit « Me voici » parce Dieu a prononcé, en vue de l’incarnation, le nom de Marie avant de prononcer le monde ; elle est la promesse par qui passe création, rédemption et incarnation. Elle est le signe que Dieu chérit tant le monde, et en particulier l’homme qu’il aime tellement, qu’il va renchérir sur le mal qui le défigure. Par Marie, en lui donnant son Fils, il guérit définitivement cette lèpre qui défigure l’homme. Le monde ne fut pas créé pour être sauvé, mais il est sauvé parce qu’il a été créé et que Dieu en le créant a trouvé que « cela était bon ».

Dieu n’a pas crée l’humanité, une espèce informe et vide, il a créé l’homme et l’a appelé par son nom, en inscrivant ce nom, comme le dit le prophète Isaïe, sur la paume de ses mains. Le « Me voici » de Marie, me dit que je suis une réponse que nul ne peut prononcer à ma place.

Au moyen âge, il y a deux écoles :
- l’une qui dit à la suite de saint Augustin que si l’homme n’avait pas péché il n’y aurait pas eu besoin de rédemption ;
- l’autre avec le franciscain Duns Scott qui crie la bénédiction de la chair, qui dit que la création fut faite pour être le lieu de Dieu. Le péché est le « non » que l’on apporte à la création, mais ce n’est pas essentiel pour qu’elle existe, puisqu’elle est don gratuit de Dieu à l’homme.

Et l’Immaculée Conception là-dedans ?

Si Jésus, selon saint Paul est « le premier-né » de la création, Marie est là, dans la tête de Dieu dès avant la création-même, condition nécessaire à l’incarnation, présence de Marie, la « bénie entre toutes les femmes », la « comblée de grâce » du « je vous salue Marie » avant même que Dieu ne façonne le monde.

Elle est porteuse d’existence, en vue du Christ. Car par Marie, un nouveau commencement et de nouveaux possibles s’ouvrent.

Marie a été conçue avant tous les siècles pour être celle dont les entrailles porteraient la Promesse et délivreraient au Monde, le vrai sens de son existence, pas celui que nous croyons, en faisant de l’argent ou en faisant la guerre, pas celui que nous croyons être dans nos désirs de messe ou de prêtres ; mais celui que nous devons attendre dans notre désir de Dieu. En Jésus-Christ, né d’une femme, la création « que Dieu dit » et qui est alors créée, et en plus sauvée.

En Marie, la conçue sans péché, éclate cette vérité au cœur du monde souillé par le péché. Même là peut surgir un salut quand une femme dit : « Me voici ! ».

Mais aussi avec le « Voici ta mère » que Jésus dit à Jean du haut de la croix, est redit à chaque homme que Marie est sa mère, une mère à la différence de notre génitrice qui ne sera jamais atteinte par la maladie et la vieillesse.

On le voit avec le curé Peyramale, comme avec les pharisiens, l’Église instituée résiste aux signes divins. Il faut du temps pour qu’ils deviennent signes, comme si nous devions dire au monde : « Voyez, nous sommes nous-mêmes l’évidence, nous avons du mal à y croire ».

Toujours dans la Bible comme dans notre Église, il y a ceux qui ne voient pas que le monde est en marche vers l’enfantement du premier-né et ils regardent vers l’arrière tels les pharisiens, telle la femme de Loth, qui est changée en statue de sel, figée sur elle-même, oublieuse de l’Avenir, car tout le passé est compris dans l’avenir et pas l’inverse. Ils ne sont pas prophètes ces gens-là, mais crient comme le Siracide « Il n’y a rien de nouveau sur le soleil » pour se rassurer. Car seul l’avenir peut vraiment donner un sens au passé des hommes, même si les écrits du passé comme pour le Christ ouvrent des portes à cet avenir.

Revenons-donc au mystère de l’Immaculée Conception !

Quand on parle d’Immaculée Conception, on pense tout de suite à une fête concernant la Vierge Marie, alors que le dogme proclamé est surtout à voir du côté du Christ : « La Vierge Marie en vue de la naissance de Jésus-Christ, sauveur du genre humain, a été préservée de la souillure du péché originel. » dit-il en substance.

Professer l’Immaculée Conception, c’est s’engager à comprendre pourquoi, ni le mal qu’on fait, ni le malheur qu’on subit ne peuvent radicalement entamer la fraîcheur de notre espérance, notre innocence première.

Si l’on parle d’Immaculée Conception, on ne peut que croire, que Marie est arrivée au désir de Dieu avant-même la création du monde, puisque cette création visait l’incarnation, et que l’incarnation devait passer par cette femme. Marie arrive dans le cœur de Dieu avant le péché des hommes ; elle en est donc exempte, puisqu’elle est l’instrument de Dieu qui permet le salut.

Mais quand on parle d’immaculée conception, on parle aussi de la Virginité de Marie.

Et quand on parle de virginité de Marie, on parle de pureté. Or, dans la tradition juive, bien des choses rendent impur : le contact avec le sang comme dans le bon Samaritain ou dans l’Hémoroïsse, le contact avec les morts comme dans la fille de Jaïre ou dans le Fils de la veuve de Naïm, le contact avec la lèpre comme dans les 10 lépreux. Et Jésus va démontrer, en entrant en contact avec tous ces gens-là, avec toutes ces impuretés face à la loi, que là aussi la pureté peut resurgir.

C’est le sens qu’il faut donner à la Virginité de Marie. La postérité de Jésus annoncée dans la généalogie de Matthieu naît d’une union illégitime entre David et Bethsabée ; simplement pour dire que rien de l’histoire entachée par le péché n’est définitivement impur, car le salut ne jaillit pas dans le monde par un acte héroïque, il jaillit par une naissance, un bébé couché dans une mangeoire, et c’est avec sa mère qu’il devra grandir, soigné et aimé par ses soins ; c’est avec elle qu’il va comprendre la vie. Car en Jésus-Christ, Dieu sauve le monde sans rien faire, juste en le créant.

Le salut c’est donc la vie de quelqu’un qui s’épanouit à l’ombre de celle d’un autre : de Marie à l’ombre de Jésus, de Jésus à l’ombre de son Père, de Joseph à l’ombre de Marie. Et nous, à l’ombre de qui nous épanouissons-nous ?

En conclusion !

Être Immaculée Conception, c’est accueillir sans résister l’irruption du Royaume de Dieu dans chaque vie humaine, où Dieu est présent, où Dieu est surprise joyeuse. Car vivre avec Dieu, c’est accueillir chaque jour comme une nouveauté ce qui nous apporte le salut.

Dire de Marie qu’elle est l’Immaculée Conception, c’est accepter de comprendre qu’elle a elle-même accepté de ne rien devoir à elle-même, mais de tout recevoir de Dieu. L’Immaculée Conception c’est l’histoire d’un don gratuit, celui de Dieu à l’homme, celui de Marie au monde.

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Depuis de nombreuses années, le deuxième dimanche de l’Avent, le diocèse est en fête et nous célébrons la Solennité de l’Immaculée Conception en la Cathédrale Saint-Jean Saint-Etienne. Comme chaque année, Mgr Jean-Luc Bouilleret présidera l’eucharistie à 15 h en sa cathédrale mais le confinement ne permettra pas à tous les fidèles diocésains qui l’auraient désiré de s’y rendre. Cependant, en ce jour de fête, dans nos communautés, si nous le souhaitons, nous pouvons tous être en communion les uns avec les autres. Nous vous proposons un texte rédigé par le recteur de la cathédrale, l’abbé Michel Bruard, qui nous invite à nous tourner vers Marie.