Homélie du père Maurice Bez
3ème dimanche de Pâques - 14 avril 2024 – Homélie
(Actes 3, 13-15,17-19 ; Ps 22 ; 1 St Jean 2, 1-5a ; St Luc 24, 35-48)
Arrêtons-nous sur la 1ère lecture : des Actes des Apôtres. Nous avons là, la 1ère proclamation de foi de Pierre en la résurrection de Jésus. Un témoignage de 1ère main. Pierre vient de guérir un paralysé qui mendiait assis auprès de la porte du Temple. La foule est complètement stupéfaite et désorientée. Cette guérison ne relève pas du pouvoir des hommes, mais un effet de la résurrection de Jésus. Pierre prend la parole pour dire le sens de ce qui vient de se produire. Il s’adresse à cette foule qui avait demandé la mort de Jésus. « Le Prince de la vie que vous avez fait mourir, Dieu l’a ressuscité ». Pierre veut ouvrir les yeux de ses frères dans la foi (les juifs) au Dieu des Pères : Abraham, Isaac, Jacob. « Vous avez agi dans l’ignorance ». En fait, Pierre veut leur dire, vous êtes responsables mais pas coupables. Pierre appelle au repentir, à la conversion.
Dans son discours, Pierre parle en tant que témoin de l’agir de Dieu. Il va dire à l’infirme, les paroles de Jésus : « Lève-toi et marche ! » Il a vu Jésus ressuscité, comme l’atteste l’Évangile de ce jour. « Voyez mes mains et mes pieds… c’est bien moi ! Touchez-moi, regardez ». Entrons dans ce récit : un témoignage de 1ère main !
Nous sommes au soir de Pâques, les disciples d’Emmaüs racontent à leurs amis ce qui s’est passé sur la route et comment ils ont reconnu Jésus à la fraction du pain. Et à ce moment, Jésus est là au milieu d’eux. Avec cette salutation : « La paix soit avec vous ! » C’est la salutation des juifs : « Shalom ! ». Luc insiste beaucoup pour nous montrer que Jésus, vraiment ressuscité, était là corporellement. Pourquoi ?
Luc s’adresse à des Grecs. Or pour eux, l’idée même de résurrection est impensable. Ils croyaient à l’immortalité de l’âme. L’homme est composé d’un corps et d’une âme, Mais l’âme est prisonnière du corps. C’est pourquoi, quand on parle de mort, ils envisagent une survie, mais jamais une résurrection. Alors que pour les juifs, il y a une unité : l’homme est corps et âme. La résurrection est totale de ce que je suis. Quand chaque dimanche, nous disons : « Je crois en la résurrection de la chair », cela veut dire : l’homme, dans tout son être de relation, d’amour, de communion, de communication… C’est la résurrection totale de ce qui fait que je suis « moi ». C’est cela que Luc veut montrer en nous disant que Jésus n’est pas un fantôme, un revenant, mais que c’était vraiment lui, en chair et en os : « Touchez-moi ! ». Mieux encore, Jésus leur demande à manger !
« Rappelez-vous les paroles que je vous ai dites ». Jésus rappelle aux disciples ses propres paroles concernant ce qui est dit dans les Écritures à son sujet : il leur fait comprendre les Écritures. Sans cesse, les disciples auront à faire mémoire de son enseignement. Tout était écrit « dans la Loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes ». Ce qui veut dire que nous avons à lire la vie au regard de la Bible. La foi est à la croisée de l’Évènement et de l’Écriture. « Il faut l’Évènement pour comprendre l’Écriture et il faut l’Écriture pour saisir l’Évènement ».
Luc insiste également comment, Jésus, ce soir-là, a ouvert l’esprit de ses disciples à l’intelligence des Écritures. Ça veut dire quoi ? Déjà, aux disciples d’Emmaüs, Jésus avait expliqué les Écritures, leur disant que tout avait été annoncé. Tout culmine en Jésus : l’enseignement de Moïse et des prophètes, les psaumes ou livres de la Sagesse. Nous savons, que nous chrétiens, quand nous lisons aujourd’hui, les Écritures, nous les lisons toutes en fonction, ou orientées vers Jésus. Et voilà que Jésus ajoute : « Ainsi est-il écrit que le Christ souffrirait, qu’il ressusciterait d’entre les morts, le troisième jour ».
Oui. Mais je remarque que ce n’est pas d’abord par la vue que les apôtres ont cru. C’est par la parole que Jésus leur adresse. Et cela peut nous conduire à méditer sur le mystère de la résurrection, sur la manière de voir aujourd’hui Jésus, de découvrir sa présence parmi nous.
Quand j’ouvre la Bible et que je lis, médite un passage, je sais que c’est quelqu’un qui me parle, c’est le Christ. C’est le premier signe que Jésus est vivant aujourd’hui, à travers sa Parole. Il est là.
Posons-nous une question : quelle place a la lecture et l’étude de la Bible pour moi ?
Cette autre question : que veut dire, pour moi Jésus est vivant, il est ressuscité ? Son repas nous parle de lui, le rend présent et comme les disciples d’Emmaüs, nous le reconnaissons « au moment où il rompit le pain ». Nos réunions : « Là ou deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux » (Mt 18, 20). Notre engagement envers nos frères « démunis ou opprimés », chaque pardon donné ou reçu, toute lutte pour la justice et la vérité, parle de Jésus et le rend présent et vivant : « Voyez, c’est bien moi ! »
N’oublions pas que « l’intelligence des Écritures » n’est pas seulement la compréhension intellectuelle et spirituelle de la Bible, mais elle conduit à « la conversion proclamée au nom de Jésus pour le pardon des péchés ».
« À vous d’en être les témoins ! » nous dit aujourd’hui Jésus à chacun de nous.
« Souviens-toi que pour beaucoup, la seule parole d’Évangile qu’ils liront sera le témoignage de ta vie » (Dom Helder Camara - Brésil).
Maurice BEZ