Homélie du père Maurice Bez
Dimanche 4 février 2024 - 5ème dimanche du Temps ordinaire - Année B
(Job 7, 1-4.6-7 ; Ps 146 ; 1 Cor 9, 16-19.22-23 ; Marc 1, 29-39)
Jésus aime les malades, il n’aime pas la maladie
J’aime bien présenter le livre dans quel est tiré la 1ère lecture. Ce sont des livres que nous n’ouvrirons pas souvent, à part lors des liturgies du dimanche. Ainsi, ce dimanche...
La première lecture est tirée du livre de Job. J’aime bien ce livre de Job. Job est un désespéré, un révolté.
Homme intègre et droit, Job coule des jours heureux, sans histoire. Avec plein de richesses : 7 000 moutons, 3 000 chameaux, 500 paires de bœufs, 500 ânesses… de nombreux domestiques, une femme et 10 enfants. Bref, le bonheur à l’état pur.
Et tout d’un coup, le malheur fond sur lui comme l’ouragan. Il perd tout, y compris ses enfants… « Pauvre comme Job ! » De plus, il devient lépreux et se retrouve sur son tas de fumier. Job maudit le jour de sa naissance…
Trois de ses amis, de bons théologiens, lui disent : « Si cela t’arrive, c’est que tu as péché ». Job proteste : il n’a rien fait de mal. Ses amis insistent. Ça ne le satisfait pas. C’est trop gros ce qu’il vit pour que ça soit Dieu qui lui inflige cela. Et voilà que sa plainte, son cri devient prière. Il entre ainsi dans une autre manière de voir. Il retrouve, dans le vide de sa vie, la confiance en Dieu.
Le cri de Job traverse les siècles. Combien d’hommes et de femmes pourraient aujourd’hui encore tenir le langage de Job. J’en ai rencontré des « Job » dans ma vie de prêtre, révoltés, rejetant Dieu ou tout lien avec l’Église ou d’autres avouant « heureusement, j’ai la foi ! ». Parce que des parents perdent un enfant, vivent une séparation, ont un jeune qui sombre dans la spirale de l’addiction… J’en ai rencontré des hommes et des femmes marginalisés économiquement et socialement, âgés ou sans travail, sans avenir et sans relation, vivant dans l’inquiétude, parfois meurtris dans leurs corps, leur tête ou leur cœur. J’ai découvert qu’ils avaient besoin que l’on prenne soin d’eux : un regard qui inspire la confiance, une proximité qui réchauffe, une bienveillance qui ne culpabilise pas (sans juger). Ils ont besoin de nous comme nous avons besoin d’eux. Nous découvrons alors notre fragilité humaine.
La Parole de Dieu ne veut pas voiler la vérité. Elle fait une large place aux pauvres de tous les temps, aux gens éprouvés par la maladie, les souffrances de toutes sortes et même l’action pernicieuse d’un mal encore plus profond : le péché.
Le livre de Job ne donne pas d’explication au problème de la souffrance. Mais il montre un chemin : du cri à la prière en passant par la confiance. (Crier et prier sont le même mot dans la langue de Jésus –l’araméen- : celui qui crie sa misère est sur un chemin de prière !)
Pour mieux comprendre que Dieu est vraiment un Père qui prend soin de tous ses enfants, il envoie son Fils Jésus. Regardons le dans cette journée qu’il passe à Capharnaüm. Il va chez Simon : « La belle-mère de Simon est malade ». « Jésus s’approcha ». Prendre soin, c’est ensuite réduire la distance. « Il la prit par la main ». « Il la fit se lever ». On emploie le même verbe (lever) pour dire la résurrection de Jésus. Prendre soin, c’est toujours, d’une certaine manière, remettre debout.
« La fièvre la quitta et elle les servait ». Elle peut à nouveau jouer son rôle de service. Quand Jésus prend soin, il restaure les personnes dans leur corps, dans leur cœur, dans leur fonction sociale. Et quand on parle de ce que Jésus a fait, on lui amène tous les malades.
Jésus, le lendemain, avant l’aube, se rendit dans un endroit désert, et là, il priait. Simon et ses amis partent à sa recherche, l’ayant trouvé, ils lui disent : « Tout le monde te cherche ». Pour Jésus, ce qui compte, c’est la rencontre avec son Père.
Comme le disait Xavier Thévenot : « Il y a une seule façon de croire encore à l’amour quand on désespère, c’est d’expérimenter la présence de quelqu’un qui, auprès de vous, humblement, est là en train de vous respecter. Quand je désespère, quand l’amour semble loin, la seule façon de croire que l’amour existe, c’est d’expérimenter qu’il y a une petite source d’amour pour moi ici et maintenant : la présence d’un ami. Alors, s’il y a une petite source d’amour, c’est qu’il y a une grande nappe d’amour qui l’alimente ».
C’est ce que font aujourd’hui ceux qui visitent et accompagnent les malades : depuis le service évangélique des malades, jusqu’aux associations de soins palliatifs, en passant par toutes les solidarités de voisinage, tout le monde de la santé… Dimanche prochain sera la journée mondiale de la Santé… Bonne semaine !
Maurice BEZ