Pâques — Paroisse du Pays de Pontarlier

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Pâques

Photo par Pascal Huguenin

Édito du jour de Pâques par le Père Jean-François Baudoz.

Évangile de la messe du jour de Pâques : Jean 20,1-9

 

Le premier jour de la semaine,
Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin ;
c’était encore les ténèbres.
Elle s’aperçoit que la pierre a été enlevée du tombeau.
    Elle court donc trouver Simon-Pierre et l’autre disciple,
celui que Jésus aimait,
et elle leur dit :
« On a enlevé le Seigneur de son tombeau,
et nous ne savons pas où on l’a déposé. »
    Pierre partit donc avec l’autre disciple
pour se rendre au tombeau.
    Ils couraient tous les deux ensemble,
mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre
et arriva le premier au tombeau.
    En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ;
cependant il n’entre pas.
    Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour.
Il entre dans le tombeau ;
il aperçoit les linges, posés à plat,
    ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus,
non pas posé avec les linges,
mais roulé à part à sa place.
    C’est alors qu’entra l’autre disciple,
lui qui était arrivé le premier au tombeau.
Il vit, et il crut.
    Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris
que, selon l’Écriture,
il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.

Edito

 

On a l’impression que tout le monde court en ce matin de Pâques : Marie-Madeleine qui, voyant le tombeau ouvert, court avertir les disciples. Puis Pierre et l’autre disciple, qui courent à leur tour au tombeau. Ils courent ensemble mais pas au même rythme, tant il est vrai que la recherche de Jésus est tellement personnelle qu’elle ne peut contraindre aucun d’entre nous à marcher au pas ! Ne nous identifions donc pas trop vite à l’un ou l’autre de ces personnages car il y a en chacun d’entre nous un peu de Marie-Madeleine, un peu de Pierre et un peu du disciple bien aimé.

Marie-Madeleine, douloureuse et désorientée. Elle aurait bien voulu toucher une fois encore le corps de celui qui l’avait délivrée de ce qui l’enchaînait dans des liens inhumains (Luc 8,2). Mais voici qu’elle est contrainte d’apprendre l’absence : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau et nous ne savons pas où on l’a déposé ! » Ce « nous » résonne curieusement dans sa bouche puisqu’elle est seule. A moins qu’elle ne représente tous ceux qui cherchent Dieu sans l’avoir encore trouvé. N’est-elle pas un peu chacune et chacun d’entre nous lorsque nous cherchons Dieu comme à tâtons, sans le voir ni même soupçonner sa présence ? Il lui faudra attendre encore un peu avant qu’elle ne puisse reconnaître vraiment Jésus : « Rabbouni ! Maître ! » (Jean 20,16).

Pierre et le disciple que Jésus aimait. S’ils n’avancent pas au même rythme, ce n’est pas d’abord pour une question d’âge mais par différence d’approche du mystère et de fonction dans la communauté. De la réaction de Pierre, nous ne savons rien. Nous savons seulement qu’il lui revient d’entrer le premier dans le tombeau, même si la foi dont il est le garant le dépasse infiniment. C’est à lui qu’un peu plus tard seront confiées les brebis du troupeau (Jean 21,15-17). Il voit les mêmes choses que le disciple bien-aimé qui lui cède le pas : le linceul et le linge qui avait recouvert la tête. Mais c’est à celui qui est le plus proche de Jésus d’entrer le premier dans l’épaisseur de son mystère : « Il vit et il crut ». Qu’a-t-il donc vu ? Il a vu les dépouilles de la mort, bien réelles et bien présentes, et il a cru, avec les yeux de la foi, qu’elles étaient les signes de la Résurrection. On ne voit qu’avec les yeux mais on ne croit qu’avec la foi. Encore faut-il ajouter que la foi ne va pas sans la vue : « il vit et il crut ». Tout est toujours une question d’interprétation. Le disciple bien-aimé atteste que les traces de la mort qu’il a vues sont le signe de son passage mais aussi de la victoire de la Vie.

Et nous, que voyons-nous et que croyons-nous ? Selon les sondages réalisés habituellement à Pâques, seul un Français sur dix croit en la résurrection. Il ne faut pas trop s’en alarmer. D’abord parce qu’il est difficile de traduire la foi en chiffres ; ensuite parce qu’en lisant plus attentivement les résultats des sondages et pas seulement les titres des journaux, on se rend compte qu’en comptabilisant tous ceux qui croient en « quelque chose » après la mort, on arrive à 50%. Est-ce peu ou est-ce beaucoup ? Est-ce que « croire en quelque chose » donne le label chrétien ? Je n’en sais rien. D’ailleurs, 50%, c’est comme l’histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein. Ce que je sais, c’est que deux mille ans après la mort et la Résurrection du Christ, on continue à vivre et à mourir pour lui. Malgré une histoire parfois lourde à porter, malgré ses fragilités et les péchés de ses représentants, l’Eglise du Christ est encore et toujours la communauté de ses disciples, donc de témoins et de martyrs. Voilà ce que nous voyons en cette fête de Pâques. Cette histoire qui se poursuit, marquée par de nombreuses blessures, nous la lisons comme le signe de la présence du Christ à son Eglise, comme le signe de sa résurrection, comme le signe de la vie qu’il ne cesse de nous donner.

Bien sûr, en cette fête de Pâques 2020, nous avons peine à croire que la vie renaît quand nous voyons nos rues désertes, quand le confinement auquel nous sommes contraints nous oblige à prendre nos distances par rapport aux autres, quand beaucoup parmi nous sont frappés par un deuil ou par la maladie… La foi ne nous dispense en rien des épreuves de la vie humaine. Elle nous fait voir la réalité autrement : « Il vit et il crut ».

Au moment où Marie-Madeleine se rendait au tombeau, les raisons d’espérer étaient bien faibles. Mais, au soir de Pâques, la désolation s’était changée en une espérance dont nous sommes les héritiers et les témoins : « Ces signes ont été mis par écrit pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant vous ayez la vie en son nom » (Jean 20,30-31).

C’est la Vie que nous demandons et c’est la Vie qui nous est promise !

Père Jean-François Baudoz