Jésus nouveau Moïse Emmanuel Barsu 16 avril

Jésus, nouveau Moïse

Le Tintoret, Moïse recevant les tables de la Loi, 1560/1562.

  L’évangile du jour (Lc 24, 35-48) vient immédiatement à la suite de celui d’hier. Nous retrouvons ainsi Cléophas et son compagnon qui ont rejoint en hâte les autres disciples à Jérusalem. On y apprend que Jésus est aussi apparu à Pierre. Et voici que Jésus se rend physiquement présent pour la troisième fois de la journée. Cette dernière apparition du jour de Pâques a beaucoup d’importance pour nous car elle permet de mieux comprendre en quoi consiste le corps glorieux du Christ ressuscité. Jésus n’est pas un fantôme, ni un esprit voyageur, il possède véritablement un corps qui permet de le reconnaître et qui porte toutes les marques de sa vie terrestre, en particulier celles de sa crucifixion. Ce corps lui permet d’entrer en relation avec qui il veut et où il veut, affranchi des contraintes du temps et de l’espace.

  Ce corps glorieux, c’est celui que nous espérons pour nous à la fin des temps, lors de la résurrection des morts quand notre âme retrouvera notre corps. En attendant, Jésus s’attache à rassurer ses disciples et surtout renouvelle à tous le grand enseignement qu’il avait donné aux disciples d’Emmaüs. Cet enseignement consiste à relire tout l’Ancien Testament (la Sainte Écriture des juifs) et à y voir tout ce qui annonce et explique la vie de Jésus. Enfin il les envoie pour témoigner au monde, à commencer par Jérusalem.

  C’est exactement ce que fait Pierre dans la première lecture (Ac 3, 1-10) en s’adressant à la foule au milieu du temple de Jérusalem. Par de nombreuses citations bibliques il explique la nouveauté de Jésus. Il s’appuie en particulier sur une prophétie du Deutéronome. Moïse y affirme :

« Au milieu de vous, parmi vos frères, le Seigneur votre Dieu fera se lever un prophète comme moi, et vous l’écouterez. » (Dt 18, 15)

Et Dieu le confirme aussitôt : 

« Je ferai se lever au milieu de leurs frères un prophète comme toi ; je mettrai dans sa bouche mes paroles, et il leur dira tout ce que je lui prescrirai. » (Dt 18, 15.18)

. Quelques chapitres plus tard le rédacteur indique pourtant : « Il ne s’est plus levé en Israël un prophète comme Moïse, lui que le Seigneur rencontrait face à face » (Dt 34, 10). Pierre comprend donc, grâce à l’enseignement de Jésus lui-même, que cette prophétie qui était restée ouverte trouve son accomplissement en la personne de Jésus. Il est le nouveau Moïse, d’abord sauvé des eaux du Nil, qui fait passer tout le peuple à travers la mer Rouge pour le mener vers la vie et la terre promise.

  Un peu plus loin dans le livre des Actes des Apôtres, le diacre Étienne, qui a lui aussi bien retenu la comparaison, va longuement développer la façon dont la vie de Moïse annonce déjà celle de Jésus (Ac 7). Bien sûr Jésus déborde largement l’annonce d’un nouveau Moïse. Il ne se contente pas de rencontrer Dieu face à face, il le contemple de toute éternité. Il ne met pas dans sa bouche les paroles de Dieu, il est lui-même la Parole de Dieu.

  À la suite de Pierre et Étienne, mais cette fois-ci par la peinture, Le Tintoret représente à son tour le lien qui unit Moïse à Jésus. Dans le tableau ci-dessus Jésus est représenté dans la nuée porté par les anges. C’est lui qui révèle à Moïse la Loi et les Dix commandements gravés sur les deux pierres (Ex 19 et 24). Les bras écartés de Moïse répondent à ceux de Jésus et nous rappellent la croix. Car n’oublions pas en ce temps de Pâques que si Jésus est ressuscité, c’est bien parce qu’il est mort pour nous. Mort et Résurrection de Jésus ne vont jamais l’une sans l’autre, nous l’expérimentons davantage cette année avec les petites morts du quotidien qui continuent, même après Pâques. 
Alléluia !

Emmanuel Barsu, prêtre